W ou le souvenir d’enfance (p 217 à 220)
Les dessous de la fabrique des icônes
Des photos, et du journalisme
Fonction documentaire de la photographie
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Dans l’usine, les ouvriers, les gestes réglés sur le rythme des machines, emballent et trient des magazines. Se révèlent des visages d’hommes et des présences singulières. (Documentaire, 14mn, France, 2008 ; Réalisation Mathilde Nègre)
« Ils existent. A trois kilomètres des Champs-Élysées. » Ainsi Pialat évoquait-il les bidonvilles de travailleurs immigrés, venus à Paris pour travailler dans les grandes usines des banlieues parisiennes.
Les usines ont désormais déserté les « banlieues rouges », parties vers la province, ou l’étranger. Les familles ouvrières, elles, y sont restées. Avec des perspectives difficiles : la mécanique du chômage et de l’éloignement, le désinvestissement des pouvoirs publics, l’exclusion urbaine.
L’usine, pour autant, n’a pas complètement disparu du paysage des banlieues. Presto en témoigne : les ouvriers s’y activent, emballent et trient les magazines, tiennent le rendement Des machines et des hommes ; une impression de vide. Le patron est toujours absent.
« Chaque année, lorsqu’on demande aux étudiants combien il reste d’ouvriers en France, les réponses sont ahurissantes. Certains disent 100.000, d’autres 500.000. Il y en a toujours un qui par bravade va aller jusqu’à les estimer à un million » explique un professeur de l’École des hautes études en sciences sociales, spécialiste de l’histoire ouvrière.
Cela surprend : en France, les ouvriers représentent en réalité 6 millions de travailleurs, soit un quart des actifs. Une « classe ouvrière » absente, divisée, qui se tient désormais dans l’angle mort médiatique. Disparue des radars, l’usine, mythifiée, apparaît comme un ailleurs lointain. Ce court-métrage tente modestement de lui rendre sa réalité, simple, et percer le décor.
Texte : Eric Scavennec ; Image : Compagnie 109