Prix du livre Inter 2012: Supplément à la vie de Barbara Loden, de N. Léger. Par Martine Delrue

Supplément à la vie de Barbara Loden, de Nathalie Léger,   P.O.L. 2012

           Née en 1960, Nathalie Léger, directrice adjointe de l’IMEC (Institut Mémoires de l’Edition Contemporaine), a été commissaire de plusieurs expositions, consacrées l’une à Antoine Vitez, au festival d’Avignon en 1994, l’autre à Roland Barthes au Centre Georges Pompidou en 2002, la plus récente à Samuel Beckett en 2007. Elle a aussi dirigé l’édition en cinq volumes des Ecrits sur le théâtre d’Antoine Vitez, établi et présenté celle des deux derniers cours de Barthes au Collège de France, La préparation du roman.

            Après un essai sur Samuel Beckett, elle a publié  en  2008 L’exposition, chez P.O.L. Supplément à la vie de Barbara Loden paraît également chez P.O.L. en 2012, et vient de recevoir le Prix du livre Inter.

            C’est l’histoire d’une femme. Mais dès les premières lignes, l’histoire ne nous est pas donnée comme une réalité; c’est la façon dont cette histoire est vue qui est précisée. Nous sommes devant une image en mouvement : « Une minuscule figure….progresse lentement ». Puis, en quelques pages, le lecteur se trouve face à trois personnages, Wanda, Barbara Loden et une narratrice sans nom qui dit « Je », ce qui induit trois niveaux de récit. C’est déjà bien, mais rapidement, ça se multiplie, se réfléchit dans d’autres miroirs, se diffracte. Un palais des glaces original nous livre d’autres  perceptions, d’autres visions. Car, à l’évidence, l’auteur s’intéresse à la vision, aux images et à l’art de la représentation.

           Wanda est présentée en tant que personnage de film. C’est une Américaine quelconque, qui se sent insuffisante, prise dans un malheur « fade », non pas dans le grand vent de l’histoire, mais dans la vie ordinaire des femmes ; ses bigoudis ne la mènent même pas jusqu’aux boucles blondes. C’est une femme simplement seule, dépersonnalisée comme Marilyn à qui elle est comparée rapidement. On ne saura jamais d’où vient sa blessure. Elle a quitté sa famille, elle se lie avec un Mr. Dennis, prêt à braquer une banque. C’est  typiquement un  film américain des années 60, motel, sueur et looser garantis.

           Derrière elle se trouve Barbara Loden, actrice devenue réalisatrice. On apprend très tôt qu’elle a été l’actrice puis la seconde femme d’Elia Kazan. Elle réalise un seul film, Wanda. On comprend aussi qu’il s’agit pour elle d’inventer un personnage qui soit le plus proche possible d’elle-même, et qu’elle joue « son » rôle. En effet, lorsque, en 1969, dans L’Arrangement, Elia Kazan tourne l’histoire romancée de sa propre immigration et de son installation aux Etats-Unis, il ne lui donne pas le rôle qu’elle a joué dans la réalité. C’est par la fiction que Barbara Loden peut se réapproprier sa vie.  

           Celle qui dirige ces deux premiers personnages apparaît à la cinquième page (auparavant  c’était un « on » : « on suit…on est entré dans une maison… » qui nous englobait habilement, nous, les spectateurs-lecteurs du film qui se déroule en mots). Ce JE est chargée d’écrire une notice pour un dictionnaire de cinéma. Ses soucis sont relatés plaisamment: comment discipliner les flots d’information que recueille celle qui se lance dans une recherche, qui étudie l’histoire des Etats-Unis, la sociologie des femmes, le cinéma-vérité, les mines de charbon en Pennsylvanie? Comment décrire ? Comment se sortir des relations ambiguës qu’entretiennent la réalité et la représentation de la réalité ? Le lecteur commence à jubiler lorsqu’il voit l’auteur multiplier les références à ce problème, jetant ça et là ses petits cailloux dans son texte. Que signifie raconter ? Nul besoin d’ouvrage théorique ou de cours de narratologie. Le texte regorge de personnages qui prennent en charge les réponses à ces questions. Comment reconstituer une vie ? Nous voyons un spécialiste-documentariste conseiller l’invention. Nathalie Léger qui a travaillé dans ces domaines s’amuse bien. Comment accède-t-on à la vérité ? Par la fiction, c’est bien connu ! Louise Colet et Flaubert sont cités à comparaître, ainsi que les acteurs qui connaissent bien ce paradoxe,  et parmi eux – diamant noir placé au centre du livre – pour évoquer une femme absente, fuyante, Delphine Seyrig sur le tournage de India Song.  A l’avant-dernière page, Nathalie Léger rendra encore  hommage à Marguerite Duras, dans l’écriture de qui elle puise ses forces puisqu’ y sont unies  les mots et  le cinéma.

          La  réalité qui est donnée est donc éclatée, fragmentée. Or, des deux côtés, on peut la creuser encore : derrière Wanda il y a le fait divers, relaté dans un journal en 1960, avec quelques répliques en anglais, ce qui authentifie le réel sans doute. De l’autre, JE elle-même se dédouble dans plusieurs conversations avec sa mère perdue dans la vieillesse qui gagne. Cette mise en abyme est assez vertigineuse.

         D’ordinaire, à partir d’un roman, d’une «  vie »  – ce qui a été le cas pour presque tous les grands romans du XIXème siècle –  on fait un film, en transposant les mots en images  sur un écran. Nathalie Léger, elle, à partir d’un film, fait un « roman », bien que le terme ne figure nulle part sur cet ouvrage. A cette vie l’auteur a ajouté force suppléments. Elle a transposé des images  en mots sur une feuille de papier, une transformation qui va durer quelque temps encore, espère-t-on, car c’est vraiment savoureux.

 

 

                                                                   Martine Delrue

Une « révolution » islandaise. Par Frédéric Lemaire

 

Malgré les résultats calamiteux des plans d’austérité imposés partout en Europe et malgré la crise sociale sans précédent, les « experts » s’accordent pour préconiser toujours plus de rigueur. Partout, les dirigeants s’exécutent : il faut bien payer la dette. Partout… ou presque. L’Islande a su renvoyer dans les cordes ses créanciers, en leur opposant une décision souveraine et démocratique. Retour sur les contours de cette « révolution » d’une petite île, qui pose de grandes questions [1]…

En 2007, avant la crise des subprimes, l’Islande est une économie dopée par une financiarisation à outrance au point que ses banques figuraient, avant 2007, parmi les 300 plus importantes du monde, représentant pas moins de 800 % du PIB. Les banques islandaises profitent d’une législation aux petits oignons: la collusion est totale entre élites politiques et économiques, au point que des dignitaires des deux grands partis sont nommés à la tête des grandes banques privatisées.

Jets privés, salaires mirobolants, les élites islandaises s’en donnent à cœur joie. Le Wall Street Journal célèbre le « miracle » islandais: « les initiatives libérales d’Oddson (NB : alors premier ministre) sont la plus formidable réussite du monde [2] ».

Plus dure sera la chute… Celle des banques islandaises, qui fait suite au krach des subprimes, est classée parmi les 11 plus grandes catastrophes économiques de l’histoire selon Moody’s. La presse financière s’étant soudainement rendu compte que les banques de la petite île étaient gonflées de vide… L’écroulement des banques plonge le pays dans la ruine, à l’exception des proches du pouvoir qui ont judicieusement changé leurs couronnes avant l’effondrement.

La nationalisation des banques transforme l’immense dette privée en dette publique. Après 20 ans de néolibéralisme total, qui a permis l’enrichissement d’une minorité, le peuple islandais est écœuré. Le rejet des partis de gouvernement (libéral, conservateur, social-démocrate) est massif.

Après 4 mois de manifestations sur la place principale de Reykjavik (du jamais vu en Islande), les islandais finissent par sortir les libéraux par les urnes aux élections de 2009. C’est la première fois en Europe que la crise a pour conséquence l’arrivée au pouvoir d’une majorité à la gauche du parti socialiste. De plus, le Parlement décidera de poursuivre le Premier ministre et le ministre des finances. Le bouleversement d’un système corrompu : c’est la première défaite de la finance.

Dès lors, une question se pose. Après la gabegie, le peuple devra-t-il payer les pots cassés ? Cette question avait déjà été anticipée par les dérégulateurs, qui avaient prévu que la garantie des dépôts pour les placements étrangers repose… sur la population islandaise. Ainsi lorsque le FMI arrive en Islande en 2008, il propose son aide sous une condition : que les islandais payent leur dette notamment à l’égard des créanciers étrangers.

Ce que la coalition socialiste-conservatrice alors encore au pouvoir accepte sans sourciller. Entre temps, l’arrivée d’une nouvelle majorité de gauche rebat les cartes. Un marché est imposé au forceps par le FMI et les créanciers de l’Islande : le remboursement de 3,7 milliards d’euros, soit 50% du PIB irlandais, sur 7 ans.

Mais au moment de promulguer la loi, votée par la majorité rouge-verte au pouvoir, le Président islandais refuse de signer. S’appuyant sur une pétition signée par plus de 50000 islandais (soit 15% de la population), il choisit de tenir un référendum sur le paiement de cette dette. Celui-ci sera sans appel : 93% des islandais voteront contre l’accord. C’est la seconde défaite de la finance.

« C’est une décision stupéfiante, qui va plonger l’Islande dans un trou noir financier. Ca va tout envoyer en l’air: fini les prêts du FMI, finies les chances de rejoindre l’Union européenne » s’exclame alors Nigel Cassidy, reporter économique à la BBC Europe.

Force est de constater qu’il avait tort: après un second « non » au remboursement de sa dette, l’Islande devrait faire le triple de la croissance de l’UE en 2012. Bien sûr, la « révolution islandaise » doit être relativisée : le processus constituant – promesse électorale de la majorité rouge-verte – patauge, et l’ancien premier ministre, poursuivi pour délits d’initiés, aura finalement été jugé non responsable.

Elle montre cependant que les alternatives existent : qu’il est possible, par la rue et par les urnes, de « dégager » des gouvernements dont les intérêts sont alignés avec ceux de la finance, et d’imposer un rapport de force aux créanciers pour permettre des alternatives à l’austérité.

 

Frédéric Lemaire

 

[1] Cet article est librement inspiré de « Quand le peuple islandais vote contre les banquiers » publié en mai 2011 dans le Monde diplomatique

[2] Hannes Gissurarson, «  Miracle on Iceland  », The Wall Street Journal, New York, 29 janvier 2004.

 

Descartes et Spinoza (III): l’espérance. Par Dominique Thiébaut Lemaire

Descartes (dans Les Passions de l’âme) emploie le mot « espérance », et Spinoza (dans l’Ethique) le mot latin « spes » (« espoir » dans la traduction de Charles Appuhn).

Le christianisme a fait de l’espérance une vertu majeure, l’une des trois dites théologales, avec la foi et la charité.
D’après le catéchisme de l’Eglise catholique (voir l’annexe 1) : « Par l’espérance nous désirons et attendons de Dieu avec une ferme confiance la vie éternelle et les grâces pour la mériter ».

Descartes et Spinoza traitent de l’espérance non pas en tant que vertu théologique, mais principalement en tant que « passion » (voir les deux articles précédents de Libres Feuillets sur la conception des passions chez ces deux philosophes), encore que Spinoza discute aussi du point de savoir si l’espérance de la vie éternelle et la crainte de l’enfer peuvent fonder la morale et la religion.

A la suite de Descartes, les moralistes français, notamment, ont continué à réfléchir sur l’espérance (voir l’annexe 2 relative à La Rochefoucauld), en poussant parfois à l’extrême leur pensée, comme Chamfort qui écrit dans ses Maximes :
« L’espérance n’est qu’un charlatan qui nous trompe sans cesse et pour moi le bonheur n’a commencé que lorsque je l’ai perdue. Je mettrais volontiers sur la porte du Paradis le vers que Dante a mis sur celle de l’Enfer : « Lasciate ogni speranza, voi ch’entrate ».

 Descartes

L’espérance comme désir

Descartes fonde l’espérance principalement sur deux des six passions qu’il considère comme premières : le désir et la joie (Les Passions de l’âme, art.165).

« La passion du désir est une agitation de l’âme… qui la dispose à vouloir pour l’avenir les choses qu’elle se représente être convenables. Ainsi on ne désire pas seulement la présence du bien absent, mais aussi la conservation du présent, et de plus l’absence du mal, tant de celui qu’on a déjà que de celui qu’on croit pouvoir recevoir au temps à venir » (Les Passions de l’âme, article 86).

Descartes considère le désir comme une passion qui n’a point de contraire :
« Je sais bien que communément dans l’École on oppose la passion qui tend à la recherche du bien, laquelle seule on nomme désir, à celle qui tend à la fuite du mal, laquelle on nomme aversion. Mais, d’autant qu’il n’y a aucun bien dont la privation ne soit un mal, ni aucun mal considéré comme une chose positive dont la privation ne soit un bien, et qu’en recherchant, par exemple, les richesses, on fuit nécessairement la pauvreté, en fuyant les maladies on recherche la santé, et ainsi des autres, il me semble que c’est toujours un même mouvement qui porte à la recherche du bien, et ensemble à la fuite du mal qui lui est contraire. J’y remarque seulement cette différence, que le désir qu’on a lorsqu’on tend vers quelque bien est accompagné d’amour et ensuite d’espérance et de joie; au lieu que le même désir, lorsqu’on tend à s’éloigner du mal contraire à ce bien, est accompagné de haine, de crainte et de tristesse… Mais si on veut le considérer lorsqu’il se rapporte également en même temps à quelque bien pour le rechercher, et au mal opposé pour l’éviter, on peut voir très évidemment que ce n’est qu’une seule passion qui fait l’un et l’autre » (Les Passions de l’âme, article 87).

L’espérance et la crainte

Pour Descartes (et plus encore pour Spinoza, comme on va le voir), l’espérance et la crainte sont intimement liées.

« Il suffit de penser que l’acquisition d’un bien ou la fuite d’un mal est possible pour être incité à la désirer. Mais quand on considère, outre cela, s’il y a beaucoup ou peu d’apparence qu’on obtienne ce qu’on désire, ce qui nous représente qu’il y en a beaucoup excite en nous l’espérance, et ce qui nous représente qu’il y en a peu excite la crainte, dont la jalousie est une espèce » (Les Passions de l’âme, art. 58).
« Et nous pouvons ainsi espérer et craindre, encore que l’événement de ce que nous attendons ne dépende aucunement de nous ; mais quand il nous est représenté comme en dépendant, il peut y avoir de la difficulté en l’élection des moyens ou en l’exécution. De la première vient l’irrésolution, qui nous dispose à délibérer et prendre conseil. A la dernière s’oppose le courage ou la hardiesse, dont l’émulation est une espèce. Et la lâcheté est contraire au courage, comme la peur ou l’épouvante à la hardiesse » (Les Passions de l’âme, art. 59).

« L’espérance est une disposition de l’âme à se persuader que ce qu’elle désire adviendra, laquelle est causée par un mouvement particulier des esprits, à savoir, par celui de la joie et du désir mêlés ensemble. Et la crainte est une autre disposition de l’âme qui lui persuade qu’il n’adviendra pas. Et il est à remarquer que bien que ces deux passions soient contraires, on les peut néanmoins avoir toutes deux ensemble, à savoir, lorsqu’on se représente en même temps diverses raisons dont les unes font juger que l’accomplissement du désir est facile, les autres le font paraître difficile » (Les Passions de l’âme, art. 165).

 La gloire et la honte

Descartes analyse aussi l’espérance d’être loué (la gloire), et la crainte d’être blâmé (la honte).

« Ce que j’appelle ici du nom de gloire est une espèce de joie fondée sur l’amour qu’on a pour soi-même, et qui vient de l’opinion ou de l’espérance qu’on a d’être loué par quelques autres. Ainsi elle est différente de la satisfaction intérieure qui vient de l’opinion qu’on a d’avoir fait quelque bonne action. Car on est quelquefois loué pour des choses qu’on ne croit point être bonnes, et blâmé pour celles qu’on croit être meilleures. Mais elles sont l’une et l’autre des espèces de l’estime qu’on fait de soi-même, aussi bien que des espèces de joie. Car c’est un sujet pour s’estimer que de voir qu’on est estimé par les autres » (Les Passions de l’âme, art. 204).

« Or la gloire et la honte ont même usage en ce qu’elles nous incitent à la vertu, l’une par l’espérance, l’autre par la crainte. Il est seulement besoin d’instruire son jugement touchant ce qui est véritablement digne de blâme ou de louange, afin de n’être pas honteux de bien faire, et ne tirer point de vanité de ses vices, ainsi qu’il arrive à plusieurs. Mais il n’est pas bon de se dépouiller entièrement de ces passions, ainsi que faisaient autrefois les cyniques. Car, encore que le peuple juge très mal, toutefois, à cause que nous ne pouvons vivre sans lui, et qu’il nous importe d’en être estimés, nous devons souvent suivre ses opinions plutôt que les nôtres, touchant l’extérieur de nos actions »(Les Passions de l’âme, art. 206).

La hardiesse et la lâcheté

Sans doute à partir de son expérience militaire, Descartes a analysé de quelle manière la hardiesse dépend de l’espérance, en distinguant d’une part, le désespoir relatif à la conservation de la vie, et d’autre part l’espérance relative à la victoire et à la gloire:
« …Bien que l’objet de la hardiesse soit la difficulté, de laquelle suit ordinairement la crainte ou même le désespoir, en sorte que c’est dans les affaires les plus dangereuses et les plus désespérées qu’on emploie le plus de hardiesse et de courage, il est besoin néanmoins qu’on espère ou même qu’on soit assuré que la fin qu’on se propose réussira, pour s’opposer avec vigueur aux difficultés qu’on rencontre. Mais cette fin est différente de cet objet. Car on ne saurait être assuré et désespéré d’une même chose en même temps. Ainsi quand les Décies se jetaient au travers des ennemis et couraient à une mort certaine, l’objet de leur hardiesse était la difficulté de conserver leur vie pendant cette action, pour laquelle difficulté ils n’avaient que du désespoir, car ils étaient certains de mourir ; mais leur fin était d’animer leurs soldats par leur exemple, et de leur faire gagner la victoire, pour laquelle ils avaient de l’espérance ; ou bien aussi leur fin était d’avoir de la gloire après leur mort, de laquelle ils étaient assurés » (Les Passions de l’âme, art. 173).

S’agissant de la lâcheté et de la peur, il semble à Descartes « … que la lâcheté a quelque usage lorsqu’elle fait qu’on est exempt des peines qu’on pourrait être incité à prendre par des raisons vraisemblables, si d’autres raisons plus certaines qui les ont fait juger inutiles n’avaient excité cette passion. Car, outre qu’elle exempte l’âme de ces peines, elle sert aussi alors pour le corps, en ce que, retardant le mouvement des esprits, elle empêche qu’on ne dissipe ses forces. Mais ordinairement elle est très nuisible, à cause qu’elle détourne la volonté des actions utiles. Et parce qu’elle ne vient que de ce qu’on n’a pas assez d’espérance ou de désir, il ne faut qu’augmenter en soi ces deux passions pour la corriger » (Les Passions de l’âme, art. 175).

 La sécurité et le désespoir. Le regret

« Lorsque l’espérance est extrême, elle change de nature et se nomme sécurité ou assurance, comme au contraire l’extrême crainte devient désespoir » (Les Passions de l’âme, art. 58).

« …Et, quand on est assuré que ce qu’on désire adviendra, bien qu’on continue à vouloir qu’il advienne, on cesse néanmoins d’être agité de la passion du désir, qui en faisait rechercher l’événement avec inquiétude. Tout de même, lorsque la crainte est si extrême qu’elle ôte tout lieu à l’espérance, elle se convertit en désespoir; et ce désespoir, représentant la chose comme impossible, éteint entièrement le désir, lequel ne se porte qu’aux choses possibles » (Les Passions de l’âme, art. 166).

Le regret est joint à l’absence d’espoir :
« Le regret est aussi une espèce de tristesse, laquelle a une particulière amertume, en ce qu’elle est toujours jointe à quelque désespoir et à la mémoire du plaisir que nous a donné la jouissance. Car nous ne regrettons jamais que les biens dont nous avons joui, et qui sont tellement perdus que nous n’avons aucune espérance de les recouvrer au temps et en la façon que nous les regrettons » (Les Passions de l’âme, art. 209).

 

Spinoza

Spinoza fonde sa réflexion au sujet de l’espoir et de la crainte sur la constatation que l’homme éprouve par l’image d’une chose future la même affection de joie ou de tristesse que par l’image d’une chose présente.

« Aussi longtemps que l’homme est affecté de l’image d’une chose, il la considérera comme présente encore qu’elle n’existe pas…; considérée en elle seule, l’image d’une chose est donc la même, soit qu’on la rapporte au futur ou au passé, soit qu’on la rapporte au présent… et, par suite, l’affection de joie et de tristesse sera la même, que l’image soit celle d’une chose passée ou future, ou celle d’une chose présente.
…J’appelle ici une chose passée ou future, en tant que nous avons été ou serons affectés par elle. Par exemple en tant que nous l’avons vue ou la verrons, qu’elle a servi à notre réfection ou y servira, nous a causé du dommage ou nous en causera, etc. …Comme, toutefois, il arrive la plupart du temps que les personnes ayant déjà fait plus d’une expérience, pendant le temps qu’elles considèrent une chose comme future ou passée, sont flottantes et en tiennent le plus souvent l’issue pour douteuse, il en résulte que les affections nées de semblables images ne sont pas aussi constantes et sont généralement troublées par des images de choses différentes, jusqu’à ce que l’on ait acquis quelque certitude au sujet de l’issue de la chose.
…Nous connaissons par ce qui vient d’être dit ce que sont l’espoir, la crainte, la sécurité, le désespoir… (Ethique, troisième partie, « De l’origine et de la nature des affections », proposition XVIII).

Le lien entre l’espoir et la crainte, et l’idée que l’espoir n’est pas bon par lui-même

A la suite de Descartes, Spinoza considère que l’espoir et la crainte sont étroitement liés. Il va un peu plus loin en insistant sur le fait qu’il n’y a pas d’espoir sans crainte, de sorte que la tristesse est toujours présente dans l’espoir, et l’empêche ainsi d’être bon par lui-même.

« L’espoir n’est rien d’autre qu’une joie inconstante née de l’image d’une chose future ou passée dont l’issue est tenue pour douteuse. La crainte, au contraire, est une tristesse inconstante également née de l’image d’une chose douteuse. Si maintenant de ces affections on ôte le doute, l’espoir devient la sécurité, et la crainte le désespoir… » (Ethique, « De l’origine et de la nature des affections », proposition XVIII).

« L’espoir est une joie inconstante née de l’idée d’une chose future ou passée de l’issue de laquelle nous doutons en quelque mesure.
« La crainte est une tristesse inconstante née de l’idée d’une chose future ou passée de l’issue de laquelle nous doutons en quelque mesure.
« Il suit de ces définitions qu’il n’y a pas d’espoir sans crainte ni de crainte sans espoir. Qui est en suspens dans l’espoir, en effet, et dans le doute au sujet de l’issue d’une chose, est supposé imaginer quelque chose qui exclut l’existence d’un événement futur; en cela donc il est attristé, et conséquemment, tandis qu’il est en suspens dans l’espoir, il craint que l’événement ne soit pas. Qui, au contraire, est dans la crainte, c’est-à-dire dans le doute au sujet de l’issue d’une chose qu’il hait, imagine aussi quelque chose qui exclut l’existence d’un événement ; et ainsi il est joyeux et, en cela, a donc l’espoir que l’événement ne soit pas » (Ethique, « De l’origine et de la nature des affections », Définitions des affections, XII et XIII)

« Il n’y a point d’affection d’espoir et de crainte sans tristesse. Car la crainte est une tristesse et il n’y a pas d’espoir sans crainte…; par suite, ces affections ne peuvent pas être bonnes par elles-mêmes, mais en tant seulement qu’elles peuvent réduire un excès de joie…
Plus donc nous nous efforçons de vivre sous la conduite de la raison, plus nous faisons effort pour nous rendre moins dépendants de l’espoir, nous affranchir de la crainte, commander à la fortune autant que possible, et diriger nos actions suivant le conseil certain de la raison » (Ethique, Quatrième partie, « De la servitude de l’homme », proposition XLVII).

Les présages et les superstitions

« … Les choses qui sont par accident des causes d’espoir ou de crainte sont appelées bons ou mauvais présages… Nous sommes disposés de nature à croire facilement ce que nous espérons, difficilement ce dont nous avons peur, et à en faire respectivement trop ou trop peu de cas. De là sont nées les superstitions par lesquelles les hommes sont partout dominés. Je ne pense pas d’ailleurs qu’il vaille la peine de montrer ici les fluctuations qui naissent de l’espoir et de la crainte, puisqu’il suit de la seule définition de ces affections qu’il n’y a pas d’espoir sans crainte ni de crainte sans espoir…, et puisque, en outre, en tant que nous espérons ou craignons quelque chose, nous l’aimons ou l’avons en haine ; et ainsi tout ce que nous avons dit de l’amour et de la haine, chacun pourra aisément l’appliquer à l’espoir et à la crainte » (Ethique, troisième partie, « De l’origine et de la nature des affections », proposition L)

La sécurité et le désespoir

Spinoza suit l’analyse de Descartes sur les choses futures au sujet desquelles il n’y a pas de doute. Mais, précise-t-il, l’absence de doute est différente de la certitude.

« La sécurité est une joie née de l’idée d’une chose future ou passée au sujet de laquelle il n’y a plus de cause de doute.
« Le désespoir est une tristesse née de l’idée d’une chose future ou passée au sujet de laquelle il n’y a plus de cause de doute.
« La sécurité donc naît de l’espoir, et le désespoir de la crainte, quand il n’y a plus de cause de doute au sujet de l’issue d’une chose ; cela vient de ce que l’homme imagine comme étant là la chose passée ou future et la considère comme présente, ou de ce qu’il en imagine d’autres excluant l’existence de celles qui avaient mis le doute en lui. Bien que, en effet, nous ne puissions jamais être certains de l’issue des choses singulières, il arrive cependant que nous n’en doutions pas. Autre chose, en effet, nous l’avons montré, est ne pas douter d’une chose, autre chose en avoir la certitude…».
(Ethique, « De l’origine et de la nature des affections », Définitions des affections, XIV et XV).

L’espoir et la crainte, la moralité et la religion

« Les hommes ne vivant guère sous le commandement de la raison, ces deux affections, je veux dire l’humilité et le repentir, et en outre l’espoir et la crainte, sont plus utiles que dommageables ; si donc il faut pécher, que ce soit plutôt dans ce sens. Si en effet les hommes impuissants intérieurement étaient tous pareillement orgueilleux, s’ils n’avaient honte de rien et ne craignaient rien, comment pourraient-ils être maintenus unis et disciplinés ? La foule est terrible quand elle est sans crainte ; il n’y a donc pas à s’étonner que les prophètes, pourvoyant à l’utilité commune, non à celle de quelques-uns, aient tant recommandé l’humilité, le repentir et le respect. Et en effet ceux qui sont soumis à ces affections peuvent, beaucoup plus facilement que d’autres, être conduits à vivre enfin sous la conduite de la raison, c’est-à-dire à être libres et à jouir de la vie des bienheureux » (Ethique, quatrième partie, « De la servitude de l’homme », proposition LIV).

Enfin, dans la cinquième partie de l’Ethique, « De la puissance de l’entendement ou de la liberté de l’homme » (proposition XLI), Spinoza en vient à l’idée que les vertus – la fermeté d’âme et la générosité : voir l’article: Descartes et Spinoza (II), de Libres Feuillets– et plus généralement la moralité et la religion, ne peuvent être fondés ni sur la crainte de l’enfer ni sur l’espoir de l’éternité de l’âme.

« Quand même nous ne saurions pas que notre âme est éternelle, la moralité et la religion et, absolument parlant, tout ce que nous avons montré dans la quatrième partie qui se rapporte à la fermeté d’âme et à la générosité, ne laisserait pas d’être pour nous la première des choses.
« Le premier et le seul principe de la vertu ou de la conduite droite de la vie est…la recherche de ce qui nous est utile. Or, pour déterminer ce que la raison commande comme utile, nous n’avons eu nul égard à l’éternité de l’âme connue seulement dans cette cinquième partie. Bien que nous ayons à ce moment ignoré que l’âme est éternelle, ce que nous avons montré qui se rapporte à la fermeté d’âme et à la générosité n’a pas laissé d’être pour nous la première des choses ; par suite, quand bien même nous l’ignorerions encore, nous tiendrions ces prescriptions de la raison pour la première des choses. »
« La persuasion commune du vulgaire semble être différente. La plupart en effet semblent croire qu’ils sont libres dans la mesure où il leur est permis d’obéir à l’appétit sensuel et qu’ils renoncent à leurs droits dans la mesure où ils sont astreints à vivre suivant les prescriptions de la loi divine. La moralité donc et la religion, et absolument parlant tout ce qui se rapporte à la force d’âme, ils croient que ce sont des fardeaux dont ils espèrent être déchargés après la mort pour recevoir le prix de la servitude, c’est-à-dire de la moralité et de la religion, et ce n’est pas seulement cet espoir, c’est aussi et principalement la crainte d’être punis d’affreux supplices après la mort qui les induit à vivre suivant les prescriptions de la loi divine autant que leur petitesse et leur impuissance intérieure le permettent. Et, si les hommes n’avaient pas cet espoir et cette crainte, s’ils croyaient au contraire que les âmes périssent avec le corps et que les malheureux, épuisés par le fardeau de la moralité, n’ont devant eux aucune vie à venir, ils reviendraient à leur complexion et voudraient tout gouverner suivant leur appétit sensuel et obéir à la fortune plutôt qu’à eux-mêmes. Ce qui ne me paraît pas moins absurde que si quelqu’un, parce qu’il ne croit pas pouvoir nourrir son corps de bons aliments dans l’éternité, aimait mieux se saturer de poisons et de substances mortifères; ou parce qu’on croit que l’âme n’est pas éternelle ou immortelle, on aimait mieux être dément et vivre sans raison; absurdités telles qu’elles méritent à peine d’être relevées. »

 ***

On voit donc que Descartes, et plus explicitement encore Spinoza, s’écartent beaucoup de l’espérance théologale.
Ils s’en écartent même davantage qu’on ne le fait à l’époque actuelle. Les sociétés dites développées telles que la nôtre vivent dans une ambiance de théologie laïcisée, où l’espérance semble plus forte que jamais, en particulier sous la forme de l’espoir en un monde meilleur sur terre, qui est loin d’avoir disparu avec la chute du communisme.
Paradoxalement, dans ces sociétés, ce n’est plus la religion qui assure aujourd’hui la pérennité de l’espérance collective, mais la science et la technologie, ainsi que la démocratie et la foi dans le progrès sous ses diverses appellations (dont la dernière en date est celle de « développement durable » après celle de « croissance »).

 

Dominique Thiébaut Lemaire

 Annexe 1

Les vertus théologales

D’après le catéchisme de l’Eglise catholique (1992) sur internet:
1833 La vertu est une disposition habituelle et ferme à faire le bien.
1834 Les vertus humaines sont des dispositions stables de l’intelligence et de la volonté, qui règlent nos actes, ordonnent nos passions et guident notre conduite selon la raison et la foi. Elles peuvent être regroupées autour de quatre vertus cardinales : la prudence, la justice, la force et la tempérance.
1840 Les vertus théologales disposent les chrétiens à vivre en relation avec la Sainte Trinité. Elles ont Dieu pour origine, pour motif et pour objet, Dieu connu par la foi, espéré et aimé pour Lui-même.
1841 Il y a trois vertus théologales : la foi, l’espérance et la charité (cf. 1 Co 13, 13). Elles informent et vivifient toutes les vertus morales.
1843 Par l’espérance nous désirons et attendons de Dieu avec une ferme confiance la vie éternelle et les grâces pour la mériter.

 Annexe 2

L’espérance dans les maximes de La Rochefoucauld

38
Nous promettons selon nos espérances, et nous tenons selon nos craintes.

75
L’amour aussi bien que le feu ne peut subsister sans un mouvement continuel ; et il cesse de vivre dès qu’il cesse d’espérer ou de craindre.

168
L’espérance, toute trompeuse qu’elle est, sert au moins à nous mener à la fin de la vie par un chemin agréable.

213
L’amour de la gloire, la crainte de la honte, le dessein de faire fortune, le désir de rendre notre vie commode et agréable, et l’envie d’abaisser les autres, sont souvent les causes de cette valeur si célèbre parmi les hommes.

492
L’avarice produit souvent des effets contraires; il y a un nombre infini de gens qui sacrifient tout leur bien à des espérances douteuses et éloignées, d’autres méprisent de grands avantages à venir pour de petits intérêts présents.

Maxime posthume 23
L’espérance et la crainte sont inséparables, et il n’y a point de crainte sans espérance ni d’espérance sans crainte.

Elisabeth Rochlin, poète et traductrice d’Erasme

Elisabeth Rochlin, l’une des traductrices des Adages d’Erasme (voir l’article de Libres Feuillets à ce sujet), a publié sous le nom d’Elisabeth Fiebig-Bétuel plusieurs recueils dont sont extraits les poèmes suivants.

 Eveil
Dans Est-ce vers l’étoile Hölderlin ? Les Editions des Prouvaires, Paris, 1982

Les couleurs de ma vie ont baigné dans tes yeux
Nimbes de flamme arcs-en-ciel de ferveur
Ferment d’étoile aurore pour ardeur
Les couleurs de ma vie ont trempé dans ton cœur

Les parfums de ma vie ont vogué dans ton âme
Ambre du rêve encensoir de candeur
Rayonnement parangon des saveurs
Les parfums de ma vie ont dansé sous tes pas

Les murs de mon silence ont frémi à ta voix
Amour du monde et charmille des rythmes
Jaillissement firmament des musiques
L’univers a surgi au plain-chant de tes bras

Dans nos mains ont vibré les sursauts de nos joies
Chair du délire et sourire des heures
Eclat de vivre extase sur mémoire
Dans tes yeux ont fondu les contours de mon coeur

 

Nuit
Dans Hauts parages des multitudes, Editions ARCAM, 40 rue de Bretagne, Paris 1983

Le froid renaît où tu me quittes
Quand la nuit lève son manteau
Soleil sur le doux de la chambre
Surgi dans le bleu du tableau

Passent tes mains au fil de l’ombre
Miroirs d’où ma forme jaillit
Aux flancs de la jarre du monde
Là où l’eau sourdement s’enfuit

Prélude-moi pour l’espérance
Gîte pour le rêve assoupi
S’éploie la force du sensible
Sur les collines des vertiges

Enserre-moi proie du délire
Ame sous la griffe et la dent
Ailes battant vers la lumière
Fièvre aux lointains inassouvie

Un goût de ciel et de silence
Au sommeil emmêlé s’étreint
Le vrai dans les mailles des mots
Guette l’ornière du destin

L’être cueille au rite des doubles
L’invite du drame et du chant
Naisse l’étoile matutine
Du cri commencement de l’homme

 

Portrait d’une lune dans l’eau (treize reflets en forme de haïkus), Editions ARCAM, Paris, 1985

Estampe de Lune
Ta paume cisèle un fruit
De vague et d’attente

La rumeur de l’être
Et du chant sur ton visage
Chaque doigt s’attarde

Le brouillard s’effrange
Où voyage l’irréel
Halo sur l’amer

L’éternel m’entraîne
Au-delà du temps des eaux
Le regard dérive

 

Quelques mots de la rédaction de Libres Feuillets

Le premier poème cité ci-dessus, « Eveil », fait un usage à la fois chantant et grave du décasyllabe 4+6, accompagné d’alexandrins qui servent de refrains, et qui mettent en valeur, à la fin de chacun d’eux, une esquisse de « blasons »: tes yeux, ton cœur, ton âme, tes pas, ta voix, tes bras, nos joies, mon cœur.

Le second poème, « Nuit », en octosyllabes, commence par un vers qu’on pourrait considérer comme un « don de l’inspiration » : « Le froid renaît où tu me quittes », et s’achève par le cri qui peut être à la fois celui de l’amour et de la naissance.

Parmi plusieurs autres poèmes, on citera dans Est-ce vers l’étoile Hölderlin ? le poème intitulé « Comptine » où l’on voit que, dans un beau mouvement,
« Jeune Seigneur Ting ébroue seul le duvet
Du brouillard qui lui naît aux épaules »,
ou encore le poème « Donneur de vie » et sa deuxième strophe, où la pierre attend de prendre vie:
« Sans toi je fus la pierre où ne prend pas le feu
Que l’eau n’arrondit pas que n’attend pas la fronde
La brume du passé où la peur environne
Sur la mer le caillou qui ne rebondit pas ».

On citera aussi, dans Hauts parages des multitudes, le poème (principalement en alexandrins) intitulé « Nova », composé de dix strophes de six vers, dont le dernier vers succédant chaque fois à un octosyllabe est particulièrement bien venu, en particulier :
–         « Plus rien n’est disloqué entre le monde et moi »
–         « A tant d’heures d’amour de toi
          « Plongeant d’un ciel moins lourd vers la terre des dieux »
–         « L’espérance de fièvre et l’amour d’être aimé »
–         « Ton corps brasier tordu aux sarments du poème »
–         « Lumière libérée dans l’espace ébloui ».
Dans le même recueil, « Volte » chante également l’amour:
–  « Dans le grisant du lit tu règnes »
–  « Dors ta prunelle étreint le vide »,
et se termine par une sorte de maxime à la fois sobre et proclamée :
« L’amour est la vision du monde »

 Ces recueils d’Elisabeth Fiebig-Betuel nous font entendre une poésie fervente dans laquelle l’auteur unit à la sincérité la maîtrise des vers.

 

 Libres Feuillets