Billet: les sapins de Noël

La pépinière en nombre a déstocké
Les plants sur pied cultivés en lopins
Dont la récolte ébauche des clairières

Comme toujours Noël a convoqué
Chez les humains l’assemblée des sapins
Mais on attend la neige costumière

Les persistants sont là prêts à troquer
Leur habit vert contre un brillant pourpoint
Fait de grésil par une dentelière

L’hiver délivre un souvenir bloqué
Dans un passé que la saison repeint
De fraîche date et d’impressions premières

Décorer l’arbre est façon d’évoquer
Les froids d’antan les vosgiens les alpins
Tantôt poudrés d’une blanche poussière

Tantôt glacés certains font suffoquer
Parés de gui dans un air cristallin
Scintillant tous de givre et de lumière

Pour ceux qui aiment les sapins de Noël, en particulier parce qu’ils évoquent des souvenirs d’enfance, le choix de l’arbre met en jeu plusieurs critères : les qualités aromatiques, la forme (avec des branches bien réparties et une flèche au sommet), la tenue des aiguilles lorsque l’arbre est coupé…  Jusqu’à une date récente, le «sapin» de Noël était majoritairement, non pas un sapin (abies alba), arbre européen le plus haut qui peut atteindre plus de cinquante mètres et vivre jusqu’à cinq cents ans, mais un épicéa (picea abies), à croissance rapide. Le sapin de Nordmann (abies nordmanniana), apparu plus récemment sur le marché et en constante progression, proche d’abies alba, garde ses aiguilles plus longtemps que l’épicéa. Il paraît qu’il faut entre six et huit ans pour qu’il acquière la taille d’un sapin de Noël. Au Canada, on utilise le sapin baumier qui dégage une odeur balsamique (abies balsamea). Dans ce pays, une autre essence est aussi utilisée, le sapin Fraser (abies fraseri), qui n’est pas parfumé mais conserve mieux sa «parure», comme dit la chanson.

Dominique Thiébaut Lemaire

Le Printemps de la Renaissance au Musée du Louvre. Présentation par Annie Birga

LE PRINTEMPS DE LA
RENAISSANCE

LA SCULPTURE ET
LES ARTS A FLORENCE 1400-1460

Musée du Louvre.

Belle exposition riche en chefs d’oeuvre qui permet de mieux comprendre la naissance et l’essor de ce qu’on appelle « stil novo » en Toscane.

Une première salle intitulée « l’héritage des pères » présente des sculpteurs du Trecento dont Nicola e Giovanni Pisano ainsi qu’Arnolfo di Cambio qui, sans renoncer au style du gothique international, traitent les visages et les draperies d’ une manière plus classique (dans le sens de rapport à l’ancien) et plus naturaliste. Un cratère monumental d’époque impériale romaine, sur les flancs duquel tourne une représentation dionysiaque, fut exposé devant la cathédrale de Pise : aussi bien l’objet d’art que son lieu de monstration témoignent de l’influence de l’antique  sur cette mutation du regard créatif.

La deuxième salle nous amène à la date de 1401, considérée comme date charnière.Il s’agit du concours destiné à choisir le sculpteur qui devra réaliser le bas-relief de bronze de la seconde porte du Baptistère, la première ayant été sculptée au Trecento par Andrea Pisano  (sans rapport familial avec les deux précédents). Restent affrontés Filippo Brunelleschi et Lorenzo Ghiberti, tous deux fils d’orfèvres. Ils représentent l’épisode biblique du Sacrifice d’Isaac. Chacun s’inspire, au moins dans un détail, d’une statue romaine, le « Tireur d’épine » et le « Torse de centaure » . C’est Ghiberti qui est retenu pour la beauté et le fini de sa composition.  Brunelleschi qui ne renonce pas pour autant à la sculpture, va se tourner vers l’architecture  et il conçoit la coupole hardie du Dôme de Florence, terminée en 1436 et dont la maquette est ici exposée. Ghiberti va continuer les scènes bibliques des Portes, dites du Paradis, et sa sculpture statuaire qui rivalise avec celle de Donatello.

Florence a un rôle déterminant dans cet essor de la Renaissance (Rinascimento). La cité est riche, ses monuments religieux et publics sont nombreux. La république florentine se  veut nouvelle Rome ou nouvelle Athènes et les humanistes en célèbrent la grandeur. Les découvertes archéologiques sont observées et recherchées par les collectionneurs, artistes souvent, qui vont à Cortone voir tel sarcophage, à Rome telle statue. Des inventions scientifiques nouvelles, en particulier la perspective , sont divulguées et dans ce domaine le traité « De Pictura » (1436) de Leon Battista Alberti a une importance capitale. Alberti qui fait son autoportrait de profil à la manière d’une médaille romaine. Quelques oeuvres peintes montrent bien que la leçon est comprise dans cette école du dessin (perspective rendue depuis les fresques romaines, par Giotto et les Primitifs,mais de manière pragmatique), tandis que pour la sculpture la technique du « stiacciato » (du verbe« écraser ») permet de distinguer différents plans plus ou moins éloignés en sortant le matériau de sa planéité. Le « Banquet  d’Hérode »de Donatello en est une parfaite illustration.

L’un des mérites de l’exposition est de placer en regard l’ancien près du moderne.Tête de cheval,  sculpture grecque d’un frappant réalisme, à côté de de celle de la statue équestre , exécutée parDonatello. Le buste d’un Pseudo- Sénèque romain repris sous la figure d’un prophète par le même Donatello et par Ghiberti dans son Saint-Matthieu, habillé en sénateur romain.  Cupidons devenus « spiritelli », petits esprits ailés, mi anges, mi enfants, passés des tombeaux païens aux chaires d’églises ou à la Cantoride Santa Maria del Fiore.

Les excellents sculpteurs sont nombreux, Michelozzo , Nanni di Banco. Mais la stature de Donatello est inégalable  et emporte l’admiration. Le Buste-reliquaire de  San Rossore, la grande statue de  Saint-Louis de Toulouse, deux bronzes dorés, ont une force expressive unique alliée à l’élégance de la forme.

La peinture de son côté revêt parfois une tridimensionnalité telle qu’on a pu employer l’expression de « peinture sculptée ». On pense à Masaccio, à Uccello, à Filippo Lippi. Mais le peintre le plus illusionniste est bien Andrea del Castagno dont sont exposées quatre fresques détachées d’ « Hommes et Femmes Illustres », où voisinent Boccace et la Sibylle de Cumes. L’exposition se poursuit avec des oeuvres de dévotion privée, Vierges et l’enfant, souvent inspirées des maîtres, Ghiberti et Donatello. Jusqu’à ce que des terres cuites soient polychromées et cette nouvelle technique revient surtout aux Della Robbia.  A côté de la dure Madonna Pazzi de Donatello,  on voit les suaves et blanches Madones  aux yeux bleus retenant un enfant parfois rétif ou parfois affectueux. Images qui vont se multiplier grâce aux ateliers. Elles reflètent bien cet autre aspect de l’art florentin, qu’on trouve  en Botticelli.

Vers le milieu du Quattrocento, la situation politique de Florence a évolué avec  la prédominance de l’oligarchie urbaine. Les Medicis déploient leur mécénat, les grands palais se construisent. C’est la maquette du Palais Strozzi  qui clôt l’exposition. La commande privée se manifeste dans des portraits . Si Desiderio da Settignano et Mino da Fiesole, les meilleurs de leur génération, sculptent dans le marbre des portraits de César, à la manière romaine, en revanche devant des modèles vivants ils savent rendre la psychologie du personnage avec une acuité et une vie insurpassables. On pense   au portrait de Diotesalvi Nerone, de Mino, ou de Giovanni di Antonio Chellini, de Rossellino.

Cette exposition a d‘abord été montrée dans sa ville mère, Florence, avant de l’être au Musée du Louvre. Elle est resserrée dans son parcours temporel et ambitieuse dans son dessein de présenter une civilisation et l’avant-garde de ce qui sera le siècle d’or du Rinascimento.

Annie Birga



Billet: le travail du dimanche

 

 

 

Les jours ouvrés quand bourdonne la ruche

Guêpier parfois de la ville et des rues

Le travailleur turbine bosse ou buche

Dans les efforts il en est tant qui bronchent

Qui prennent l’eau qui ne tournent pas rond

 

Il est des soirs où celui qui se couche

Espère en rêve un réveil sans à-coups

Sans café noir trop amer dans la bouche

Tous les matins c’est à nouveau l’embauche

Et le turbin n’est pas forcément beau

 

Celui qui veut travailler le dimanche

Pour gagner plus va très étourdiment

Laisser son chef  lui retrousser les manches

Et les clients n’en seront pas plus riches

Ceux qui le croient mieux vaudrait qu’ils en rient

 

Il faut un jour pour faire un peu relâche

Et ralentir les corps et les cœurs las

Qui s’exténuent sous les coups de cravache

Ne pas toujours s’échiner sur la brèche

Mais prendre l’air dans une roseraie

 

***

 

Il est question de réformer à nouveau le régime applicable au travail du dimanche, pourtant déjà remanié en 2009. Un rapport sur ce sujet a été remis au premier ministre le 3 décembre 2013. L’idée serait, dit-on, de trouver un juste milieu entre trois objectifs:

          surcroît de souplesse pour répondre aux attentes des commerces et des consommateurs, y compris les touristes ;

          amélioration de la situation des salariés par l’octroi de contreparties au travail du dimanche et par la suppression des inégalités de traitement ;

     clarification afin de mettre fin à la confusion résultant de la grande diversité des régimes applicables…

 

Vaste programme, sachant que :

          les consommateurs favorables au travail du dimanche (pour les autres) sont aussi des salariés favorables au repos dominical (pour eux-mêmes);

  les salariés et les syndicats veulent des contreparties (salaire plus élevé, repos compensateur….), mais les employeurs ne veulent pas qu’elles mettent en difficulté les commerces ;

          le volontariat est posé en principe, mais on sait bien que dans les rapports inégaux entre employeurs et employés, le volontariat devient vite une obligation de fait.

 


Pour l’éditorial du Monde daté du 4 décembre, les groupes de pression risquent fort d’aggraver l’« imbroglio dominical », et le Parlement ne sera pas en reste : « quand il sera appelé à appelé à examiner le texte annoncé, nul doute qu’il sera, comme en 2009, le théâtre d’un intense lobbying ».

 Pour le journal Les Echos du 3 décembre 2013, « le principe du repos dominical est réaffirmé, mais le rapport veut étendre les zones où le travail sera autorisé ».

 

Bref, les exceptions vont confirmer la règle, et des dérogations encore plus larges vont la confirmer encore davantage !

Dominique Thiébaut Lemaire